- Paraît chaque dimanche à 8 heures tapantes, méridien de Paris -

dimanche 26 juin 2016

Freude, schoener Goetterfunken, Tochter aus Elysium, Wir betreten feuertrunken, Himmlische, dein Heiligtum!





(...)
Freude, schöner Götterfunken
Tochter aus Elysium,
Wir betreten feuertrunken,
Himmlische, dein Heiligtum!

Deine Zauber binden wieder
Was die Mode streng geteilt;
Alle Menschen werden Brüder
Wo dein sanfter Flügel weilt.
(...)


(...)
Joie, belle étincelle divine,
Fille de l'assemblée des dieux,
Nous pénétrons, ivres de feu,
Ton sanctuaire céleste!

Tes charmes assemblent
Ce que, sévèrement, les coutumes divisent;
Tous les humains deviennent frères,
lorsque se déploie ton aile douce.
(...)

An die Freude, 
Friedrich von Schiller

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“Géométrie politique : le carré de l'hypoténuse parlementaire est égal à la somme de l'imbécilité construite sur ses deux côtés extrêmes. ”

Pierre Dac




Bonjour à toutes et tous!


En ce dimanche vraiment particulier,
où, moi, grand amateur de la Grande-Bretagne depuis si longtemps - je la considère comme mon deuxième pays -, j’en viens à épingler sur la carte les régions qui ont voté en faveur du “Brexit” pour ne plus m’y rendre par crainte de me faire cracher dessus en tant que sale étranger - heureusement, sont épargnés par ce raz-de-marée nauséabond Londres, l’Écosse, les Cotswolds… -, 
nous continuons tranquillement notre tour de *ten-, “étendre, étirer”.

Oui, vous me connaissez, j'exagère toujours un peu, mais en tout cas ça ne m'a pas fait plaisir, ce qui vient de nous arriver...


QUOI? Vous ne connaissez pas les Cotswolds????

Les Cotswolds, c'est ÇA!
Une des plus belles régions d'Angleterre, un peu à l'ouest d'Oxford



Non, nous n’en avons pas encore fini, avec cette délicieuse racine…

Nous l’avons déjà bien utilisée, notre petite *ten-, avouons-le: nous en sommes quand même au NEUVIEME article à son propos!

Ben oui, c'est la partition de la Neuvième de Beethoven...

Vous aurez reconnu, je l'espère, dans le titre de cet article,
les premiers vers de l'Hymne à la Joie,
que Beethoven écrivit sur le texte de Friedrich Schiller



Nous avions vu, dimanche dernier, que par une forme *tn̥-ti-, *ten- allait nous donner le substantif grec … τασις, tasis “tension, étirement, intensité”.


Eh bien, repartons de là!
Car sur le grec -tasis, nous trouvons encore …

... entasis.

Ce mot latin se calque sur l’ancien grec έντασις, ‎éntasis, “tension, pression”, construit sur le verbe εντείνω, ‎enteínō, “étirer, tendre…”

En architecture, l’entasis est ce galbe, ce léger renflement que l’on donnait au fût d'une colonne pour donner l’impression qu’elle était plus convexe.

Oui, vous pensez bien, une colonne grecque ou romaine, ça pouvait être assez haut.
Et vous étiez supposé contempler cette colonne, ou du moins le temple qu’elle soutenait, depuis le bas de la colonne.

Et là, horreur! 
Ainsi vu du bas, le fût d’une colonne donne l’impression d’être ... concave.



Beeeerk!

Alors, on trichait, et on compensait cette impression de concavité en rendant les colonnes ... convexes!



Concave, convexe


Ce qui explique d’ailleurs pourquoi la façade d’un temple grec est VRAIMENT très convexe vue d’avion. 
À ça, ils n’y avaient pas pensé, les gros malins.

Donc, quand vous survolez Athènes, SURTOUT, ne regardez pas en bas, ça vous fera mal.
À moins bien sûr que vous ne fassiez partie de ces personnes qui apprécient les colonnes convexes?? 
Mais bon, ce n’est pas à moi de juger. Chacun son truc.
Mais oui, je vous l'avais dit, pourtant!!


Ça, c'est l'entasis selon les Romains ou les Grecs

Et ça c'est le résultat d'une entasis:
En 1, le temple tel qu'on est supposé le voir

en 2, le même temple, tel qu'on le verrait avec l'effet de distorsion
visuelle
rendant les colonnes au fût droit concaves

en 3, enfin, le temple tel que réellement construit,
avec des colonnes très légèrement inclinées vers l'intérieur,
pour contrecarrer l'illusion optique en 2,
et donnant donc visuellement ce magnifique temple en 1
(source)


Parlons à présent biologie:

Comme son nom l’indique clairement, Julius Konstantin Ernst Kollmann (1834-1918), anatomiste, zoologiste et anthropologiste allemand, était un mec constant, sérieux, mais aussi assez cool.

Julius Konstantin Ernst Kollmann
(1834-1918)

Il proposa ainsi le mot “Neotenie” au glossaire de la biologie du développement.

Plus cool que ça!

Il l’avait construit, son Neotenie, sur du grec ancien, en prenant le préfixe νέος, néo, “nouveau” et en l’accolant à notre τείνω, teínō, dont je ne vous dirai plus qu’il signifie « étirer, tendre ».
(Plus tard, le mot sera superbement, très subtilement, francisé en néoténie.)
Ce mot, qu’il plaça dans plusieurs articles publiés en 1884 ou 1885, décrivait
- en biologie du développement, donc, on suit! - 
la conservation de caractéristiques juvéniles chez les adultes d'une espèce, ou le fait d'atteindre la maturité sexuelle pour un organisme encore au stade larvaire.
Ces phénomènes sont surtout observés chez des amphibiens et des insectes, pour lesquels on parle de pédogenèse.
Cette néoténie est un cas particulier d'un type de pédomorphose.

Ouais! Je vous vois venir, et je tiens, sur le champ, à préciser...
- car on m’a déjà reproché ce genre de vils colportages -
... que je ne rapproche AUCUNEMENT les termes pédogenèse et pédomorphose de pratiques ignominieusement attribuées à certains membres du clergé de L'Église catholique, apostolique et romaine.

Je voudrais que cela soit bien clair.



L'exemple le plus connu de néoténie est représenté par l'axolotl.

Mais oui, oh, enfin!
L’axolotl, Ambystoma mexicanum, cette espèce d'urodèles de la famille des Ambystomatidae.
Il faut vraiment tout vous dire…

axolotl
Oui, il y a comme qui dirait une certaine ressemblance


Il fait partie des animaux ayant la capacité de passer toute leur vie à l'état larvaire (je connais des êtres humains dotés de cette même capacité) sans jamais se métamorphoser en adulte, et donc de se reproduire à l'état ... larvaire (ce qu’on appelle la pédogenèse, mais n’y voyez aucune allusion, de grâce).


D’ailleurs, la preuve que je les aime bien, les membres du clergé: c’est d’un abbé que je vais vous parler maintenant!

Et pas n’importe lequel...

Ce bon abbé René Just Haüy, né le 28 février 1743 à Saint-Just-en-Chaussée (dans l'Oise), et mort le 3 juin 1822 à Paris, était un grand minéralogiste.

l'abbé René Just Haüy

C’est lui qui a fondé, avec Jean-Baptiste Romé de L'Isle, la cristallographie géométrique.



Imaginez un seul instant un monde sans cristallographie géométrique, et vous prendrez conscience de ce que nous lui devons tous!

Ce bon René Just emprunta au grec ancien ἀνάτασις, anátasis, de sens littéral “allongement, extension”, composé de ἀνατείνω, anateinô et de la finale substantivante -σις, -sis.

Il en fit… anatase (1801).

Il baptisa d’anatase - ce qui n'est peut-être pas très gentil - une espèce minérale particulière, au cristal octaédrique … allongé.

Anatase

Je vous donne un bon truc, pour éviter de vous ridiculiser!
Si vous avez de l’anatase, surtout, surtout, ne la chauffez pas à plus de 700 °C, sinon elle se transforme en rutile.

Et alors, vous avez l’air fin.

- Viens, mon petit garçon, je vais te montrer ma collection d'anatase, dans la sacristie.
Je la conserve à plus de 700 °C, comme ça elle brille!
- Oh merci mon père!
- Et hop, voilà! Mais mais... ce n'est plus que du rutile??
- Ouaiiiiiiin, je veux rentrer!!
- Attends mon petit, ne t'en vas pas, je vais alors te montrer ma stilbite.
PS:
Le rutile est une espèce minérale composée de dioxyde de titane avec des traces de fer (près de 10 % parfois, rendez-vous compte?!), tantale, niobium, chrome, vanadium et étain. Il est trimorphe avec la brookite et l'anatase (il n'en peut rien, hein). Il est la forme la plus stable de dioxyde de titane et est produit à plus de ... 700 °C ; la brookite se formant à des températures plus basses et l'anatase étant formée à des températures encore inférieures. 
rutile
Quant à la stilbite, c'est un minéral du groupe des silicates, sous-groupe des tectosilicates, de la famille des zéolites.
stilbite


Allez, un dernier mot pour ce dimanche!

Celui-là, aucun doute, vous le connaissez…

Je vous en donne la définition:
Dans un triangle rectangle, il s’agit du côté opposé à l'angle droit.  
Il s’agit du plus grand côté.  
Selon Pythagore, son carré est égal à la somme des carrés des deux autres côtés…

Ben oui, il s’agit bien de … l’hypoténuse.
le triangle rectangle...
... et le théorème de Pythagore


Nous avons emprunté hypoténuse, au début du XVIème, au latin hypotenusa, simple transcription du grec ancien ὑποτείνουσα, hypoteinousa, que l’on pourrait traduire littéralement par “soutenante”, car il s’agit du participe présent féminin de ὑποτείνω, hypoteínô, “sous-tendre, soutenir”, où vous reconnaissez notre fameux τείνω, teínō, cette fois précédé du préfixe ὑπο-,‎ hupo-, “sous”.
On peut également comprendre hypoténuse comme “se tenant, ou se tendant sous (les angles)”.


Bon, moi je vais encore me lamenter un peu sur le brexit, me boire un solide verre de Whisky ECOSSAIS et enfin choisir une formule de séjour dans un bel hôtel LONDONIEN, cadeau de départ que mes formidables anciens collègues viennent de m'offrir...

Oui, je quitte ma société, et par voie de conséquence mon client principal, pour de nouvelles aventures! Dès demain!



Je vous souhaite, à toutes et tous, un très bon dimanche, une semaine radieuse!


Frédéric


Attention,
ne vous laissez pas abuser par son nom:
on peut lire le dimanche indo-européen 
CHAQUE JOUR de la semaine!

(Mais de toute façon,
avec le dimanche indo-européen,
c’est TOUS LES JOURS dimanche…).


Oui, l'hymne à la Joie, de la Neuvième, 
devenu l'hymne européen.

Un Allemand chanté par des Espagnols
Que dire de plus?

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